Introduction

La Maison en tant que théâtre explore la thèse de l’influence des décors peints pour le théâtre antique gréco-romain sur le développement des peintures murales romano-campaniennes situées dans un environnement domestique, et ce, dans la perspective d’évaluer la légitimité de leur utilisation pour la reconstitution des décors de théâtre antique. Grâce à La Poétique d’Aristote, nous savons que, dès le premier siècle av. J.-C, « Sophocle institua trois acteurs et la mise en scène ». Ainsi, une certaine forme de chevauchement aurait très probablement pu apparaître entre les peintures murales des intérieurs privés et les décors peints de théâtre (Aristote, La Poétique, chap. IV, xiv, trad. Jules Barthélemy-Saint-Hilaire, Paris, Ladrange, 1838).

À l’époque d’Auguste, Marcus Vitruvius Pollio, architecte et ingénieur militaire , plus connu sous le nom de Vitruve, a proposé pour cette interaction une date, à la fois plus ancienne et peu commune, lorsqu’il a attribué à Agatharque, non seulement les décors peints de théâtre, mais également l’introduction de la perspective à points de fuite, dans le but de créer une illusion de profondeur sur une surface plane (Vitruve, De l’architecture, Vol.2, Livre VII, 0.11, trad. Ch.-L. Maufras, Paris, C. L. F. Panckoucke, 1847). Selon Plutarque, un peintre nommé Agatharque avait été piégé et enfermé dans la demeure d’Alcibiade pendant trois mois jusqu’à l’achèvement d’une série de peintures murales (Plutarque, Vie des hommes illustres, Tome I : vie d’Alcibiade, trad. Alexis Pierron, Paris, Charpentier, 1853). Si ce nom, cité deux fois, renvoyait au même artiste, alors cette information aurait permis d’établir une connexion tangible entre les « décors peints » de théâtre et les peintures murales domestiques. Malheureusement, les preuves, pour la plupart provenant d’époques et d’origines différentes, suggèrent que ces deux peintres n’étaient pas une seule et même personne.
< voir : Agatharchus >

Depuis le début du xxe siècle, plusieurs historiens ont soutenu la thèse affirmant que les peintures murales antiques représentant de grandes façades architecturales, propres au deuxième style dit « architectural », étaient soit copiées, soit dérivées des décors peints de théâtre (fig.1). Sur la base de ce postulat, ces œuvres fournissent alors un support légitime pour la reconstitution des décors de théâtre antique, car peu nombreux sont les témoignages visuels. Ces derniers ont été retrouvés en majorité sous la forme de représentations aux allures de décors théâtraux sur des vases antiques et des tablettes en terre cuite (fig.2-6). Par conséquent, plusieurs auteurs ont tenté de reconstituer dans leurs publications les décors tragiques, comiques et satyriques, à l’aide d’éléments visuels extraits des peintures murales du deuxième style. Des exemples de ces décors de théâtre réinventés apparaissent, d’abord,  dans l’article Scaeonographia de 1936 de A.M.G Little et dans l’ouvrage monumental en deux volumes de H. G. Beyen, intitulé Die Pompejanische Wanddekoration vom Zweiten bis zum Vierten Stil publié en 1938 (figs.7-8). Dans certains cas, les illustrations ont été employées pour la réalisation de véritables décors de théâtre destinés aux représentations modernes de drames gréco-romains. Selon Margaret Bieber, spécialisée dans l’histoire du théâtre, Little a eu recourt à « […] des éléments de décors imitant les peintures murales pompéiennes » pour certaines de ses productions théâtrales, telles que Alcétis (Euripide) en 1936 et 1939 à la Havard University, Les Nuages et Les Oiseaux (Aristophane), ainsi que Mostellaria (Plaute) (Bieber, 1972, p. 454–456).


La Maison en tant que théâtre
Villa Fannius P Synistor 1
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1. Villa P Fannius Synistor triclinium mur ouest (c.50 BC)
2. Comédie du sud de l’Italie où les acteurs parodient le mythe d’Apollon guérissant Chiron le centaure. Cratère en cloche attique à figures rouges - British Museum
3. Oreste et Pylade rencontrant Iphigénie en Tauride, Musée du Louvre
4. Oreste et Pylade rencontrant Iphigénie en Tauride(détail)
5. Apulian Cratère en cloche attique - acteurs jouant la naissance d’Hélène sortant d’un oeuf. Museo Archeologico, Bari, Italie
6. Acteurs jouant en face d’une façade de théâtre à colonnades et à trois portes- panneau peint en terracotta 
7. Reconstitution peinte (détail) par A.M.G. Little d’un décor de théâtre antique basée sur différentes peintures murales romano-campaniennes 
8. Reconstitution peinte par H.G.Beyen du dessin d’Apaturius pour un décor de théâtre décrit par Vitruve dans ses Dix Livres sur l’Architecture (c.20 BC), combinée à des détails empruntés à différente peintures murales romano-campaniennes

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