Le nombre croissant d’indices suggérant la présence d’ateliers d’art et d’artisanat dans la zone environnant Putéoles sous-entend également que cette partie de Campanie/Magna Graecia aurait disposé de ses propres communautés créatives florissantes, peut-être même faisaient-elles de la concurrence à celles de Rome. Comme John Ward-Pekins et Amanda Claridge l’ont dit de façon concise, « le pouvoir et l’autorité étaient passés aux mains de Rome, mais en matière de commerce, de culture et d’art, la Campanie connaissait une prospérité aussi grande, et même plus importante sur certains plans, que celle de Rome même. » (Ward-Perkins, John, Claridge, Amanda, Pompeii AD79, 1977, p. 15) (F. Altheim dans History of Roman Religion, 1938, p. 291 soulève un point similaire lorsqu’il prétend que les preuves archéologiques appuient la théorie selon laquelle le « courant hellénistique », comme il l’appelle, a cheminé jusque Rome depuis le sud de l’Italie, principalement grâce aux communautés grecques de Magna Graecia ainsi qu’à leurs relations culturelles et commerciales de longue date avec la Grèce continentale.)

La présence de théâtres et d’amphithéâtres permanents en Magna Graecia bien avant Rome renforce également l’idée que le statut de la région était bien plus qu’un statut provincial du point de vue des productions culturelles. Capoue, près de la ville actuelle de Naples, possédait le plus grand amphithéâtre d’Italie avant la construction du Colisée à Rome. L’amphithéâtre de Pompéi est le plus ancien d’Italie et son théâtre permanent a été construit près de 100 ans avant que le général Pompée ne démarre la construction du premier théâtre en pierre de Rome (fig. 1).

Bien que certains faits semblent ainsi saper le statut de Rome en tant qu’épicentre culturel, il convient de garder à l’esprit que Pompéi est devenue une colonie romaine en 80 av. J.-C. suite à la campagne de Sylla. Une fois soumis, les Pompéiens ont été forcés de céder leurs habitations aux légionnaires et à leur famille. L’appropriation des habitations et la date de l’assujettissement sont toutes deux des évènements majeurs car de nombreuses peintures murales architectoniques et figuratives de Pompéi ont été créées à partir de 80 av. J.-C. Si cette affirmation est correcte, elle suggère que la peinture murale orientée vers l’architecture et la perspective (Deuxième style – Mau) pourrait avoir été introduite suite à la colonisation romaine.


Maisons, villas et peintures murales

Une des premières remarques de l’écrivain allemand Goethe lors de son entrée dans Pompéi fin 1780 était que les habitations étaient « […] de petites maisons sans fenêtres […] » (Goethe, J.W., Voyage en Italie, traduit par Jacques Porchat, 1862, Hachette, p. 246). L’observation de Goethe était peut-être vraie à l’époque de sa visite mais des fouilles plus récentes ont permis de découvrir de véritables palais. La Casa del Fauno, par exemple, occupe une superficie de 2 940 mètres carrés et est souvent décrite comme un palais hellénistique (fig. 2). En ce qui concerne l’absence apparente de fenêtre de la plupart des propriétés déterrées, elle est en partie due au fait que les fenêtres, si seulement elles étaient utilisées, étaient normalement situées au-dessus du niveau de la rue, principalement pour des raisons de sécurité, et ce niveau a disparu à cause de l’éruption. En plus des mesures de sécurité, les maisons étaient orientées vers l’intérieur afin de s’adapter aux changements de saison. Les toits inclinés vers l’intérieur avec des ouvertures au centre permettaient d’avoir de la lumière, de l’air et d’être approvisionné en eau fraîche. Au niveau du sol, il y avait donc une énorme quantité de murs sans fenêtre qui pouvaient accueillir des peintures murales allant du sol au plafond. La plupart du temps, l’entrée de la pièce était la seule rupture dans cette continuité, permettant ainsi de disposer une série d’œuvres sur l’ensemble des murs intérieurs de la pièce.

 

 

A la rencontre des peintures murales
Casa del Fauno Pompeii 2
Amphitheatre Pompeii 1
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1. Amphithéâtre de Pompéi (photo de Giorgio Sommer, 1834-1914).

2. Casa del Fauno, vue de l’atrium au tablinum et jardin à péristyle derrière (photo de Giorgio Sommer, 1834-1914).