Fellini fait appel à une reconstitution de film muet dans Fellini Roma pour railler d’anciens clichés politiques et religieux. L’association d’une religiosité, à l’écran comme dans la vie la privée, révèle et sape ostensiblement la façon dont les premiers films italiens promouvaient le catholicisme de façon éhontée. En revanche, la parodie des films de propagande fascistes tourne en dérision les tentatives des fascistes visant à encourager la jeunesse italienne à faire des exercices de gymnastiques afin de se battre pour leur mère patrie (fig. 1). La voix tonitruante d’un narrateur exhorte ces jeunes, à devenir aussi forts que leurs glorieux ancêtres romains qui ont vaincu Hannibal et conquis Carthage. Ironiquement, il s’agit des mêmes ancêtres « païens » qui ont donné les chrétiens en pâture aux lions. La propagande déguisée a commencé en noir et blanc avec Cinecittá à Rome, avant devenir grâce à Hollywood, de somptueux déploiements technicolors sur grand écran. Nombre de ces scripts de film reposent également sur des romans tout aussi riches de récits factices sur la persécution des chrétiens et donnent naissance à des films tels que Quo Vadis ? (1951) (fig. 2), Néron (1909), Le signe de la croix (1932), Spartacus (1952) (fig. 5) et Ben-Hur (1959). Ces films ont converti le martyre chrétien romantisé en succès commercial en puisant dans le fondamentalisme religieux américain et le désir universel insatiable de découvrir des versions spectaculaires de l’histoire.


Épées, sandales et toges : le problème de l’authenticité

Depuis les débuts du cinéma jusqu’à l’incarnation hollywoodienne du septième art, les déclarations des producteurs concernant l’authenticité de leurs films ont toujours été démesurées. L’objectif des images animées semblait être de « ramener le passé à la vie » et de « raconter la meilleure histoire de tous les temps ». Ainsi, les revendications  d’authenticité historique se retrouvaient au cœur des campagnes publicitaires. Les films à gros budget, ou « péplum » comme certains les appellent de façon cynique, tels que Cléopâtre (1963), Cleopatra’s Daughter (fig. 3), La chute de l’Empire romain (1964) (fig. 4) et Spartacus (1960) (fig. 6), de même que les films de série B à petit budget mettant en scène le Mr. Univers du moment (fig. 7) ont tous fait l’objet de déclarations absurdes concernant l’authenticité et la somme nécessaire à leur réalisation. La plupart d'entre eux étaient en vérité tournés dans les studios d’Hollywood ou sur les dunes de Californie et, malgré les montants prétendument colossaux et la quantité de documentation historique mise à disposition, les décors étaient systématiquement des caricatures inspirées de peintures du xixe siècle. Les péplums, comme Quo Vadis ?, s’amusent à confronter la piété chrétienne et l’hédonisme païen, censés être représentés à travers des décors grotesques truffés de faux or, de marbre et de peintures murales. Le Satyricon, un ancien texte satirique attribué à Pétrone, l’arbitre de l’élégance de Néron, a servi de base à de nombreux scénarios hédonistes et à des tournages à gros budget. Une vision de l’Histoire à travers les filtres de la fantaisie et du spectacle, plutôt qu’à travers le prisme de l’authenticité, détermine souvent les choix et la plupart des références historiques des mises en scène.

La peinture murale romaine et la culture cinématographique
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