Dieux, héros et ancêtres (Style Ornemental ou Troisième style)
La peinture murale de Deuxième style suivait en grande partie l’opinion de Vitruve selon laquelle les représentations picturales devaient être conformes aux lois physiques du monde connu.
« (1) […] Et, en effet, la peinture ne doit représenter que ce qui est ou ce qui peut être, comme un homme, un édifice, un vaisseau, ou toute autre chose dont on imite avec exactitude la forme et la figure. »
Vitruvius Pollio (env. 25 av. J.-C.), Les dix livres d’architecture (7.5.1), Ch.-L. Maufras, éd. C.-L.-F. Panckouck - http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k23663n/f143.image
Par opposition à la demande de Vitruve de faire preuve de réalisme dans la structure de la peinture, le Troisième style ou Style « Ornemental », comme Mau l’a nommé, s’éloignait de plus en plus des représentations de « choses qui existent vraiment » pour se centrer sur des illustrations de fantaisies architecturales entremêlées d’arabesques et de formes grotesques (fig. 1). Alors que les références architecturales devenaient moins réelles, elles servaient de cadre pour un nombre croissant de peintures figuratives et narratives, principalement des paysages bucoliques, sacro-idylliques et mythologiques contenant un panthéon de dieux masculins et féminins accompagnés de leurs emblemata et de leurs acolytes (fig. 2). Curieusement, ce début de style opulent d’apparence rococo est habituellement daté de la seconde moitié de la période d’Auguste, normalement apparentée à un retour à des valeurs romaines plus stoïciennes. Ce style se différencie également des deux précédents en remplaçant les représentations de faux marbre par de grandes zones monochromatiques, habituellement rouges, noires ou blanches, parfois bleues et plus rarement vertes. Des colonnes et des pilastres élancés, semblables à des « tiges », créaient des divisions géométriques devant et entre des fonds monochromatiques, contenant souvent des personnages tenant des objets symboliques (fig. 3). L’aspect irréel de ces personnages souvent ailés ne semblait étrangement pas gêner Vitruve et son œil critique, mais les références architecturales non structurelles, combinées parfois à des formes grotesques, le poussaient à les condamner dans ses écrits :
« (3) Mais cette belle nature, dans laquelle les anciens allaient prendre leurs modèles, nos goûts dépravés la repoussent aujourd'hui. On ne voit plus sur les murs que des monstres, au lieu de ces représentations vraies, naturelles ; en place de colonnes, on met des roseaux ; les frontons sont remplacés par des espèces de harpons et des coquilles striées, avec des feuilles frisées et de légères volutes. On fait des candélabres soutenant de petits édifices, du haut desquels s'élèvent, comme y ayant pris racine, quantité de jeunes tiges ornées de volutes, et portant sans raison de petites figures assises; on voit encore des tiges terminées par des fleurs d'où sortent des demi-figures, les unes avec des visages d'hommes, les autres avec des têtes d'animaux. (4) Or, ce sont là des choses qui ne sont pas, qui ne peuvent être, qui n'ont jamais été. Cependant ces nouvelles fantaisies ont tellement prévalu que, faute d'un homme qui soit en état de les apprécier, les arts dépérissent journellement. Quelle apparence, en effet, que des roseaux soutiennent un toit, qu'un candélabre porte des édifices, que les ornements de leur faîte, c'est-à-dire des tiges si faibles et si flexibles, portent des figures assises, ou que des racines et des tiges produisent des fleurs et des demi-figures? » (fig. 4)
Vitruvius Pollio (env. 25 av. J.-C.), Les dix livres d’architecture (7.5.1), Ch.-L. Maufras, éd. C.-L.-F. Panckoucke - http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k23663n/f143.image
|