Le sacrarium
Il est également prouvé que, en marge des espaces sacrés domestiques, certaines maisons renfermaient des sacraria (pièces à vocation de sanctuaire) dédiées à des formes de culte spécifiques. D’après Fabrizio Pesando, la maison du sanctuaire d’Ilion recourrait aux peintures et aux stucs dans le sacrarium pour « renvoyer de manière claire à la piété des occupants, à l’exaltation de leurs origines présumées et à leur célébration du spirituel. » (fig. 1)
Au sommet du plafond voûté du sanctuaire d’Ilion, on peut observer un médaillon illustrant l’enlèvement de Ganymède, une figure mythologique associée à l’apothéose et à l’immortalité (fig. 2). Des variations sur ce thème étaient souvent placées au sommet des plafonds ; sa présence ici tend à confirmer l’opinion de Pesando, qui estime que le sacrarium était employé pour la pratique cultuelle, probablement liée aux Troyens ou aux ancêtres de la familiae Troianae. Cette idée est attestée par des peintres murales et par des panneaux en relief recouverts de stuc, qui illustrent des récits homériques à la gloire d’Hector, alors déifié et considéré comme le héros protecteur de la maison.
En particulier, une pièce de la Casa di M. Fabio Rufo aurait pu avoir servi de sacrarium. À l’origine, la pièce semble avoir été dédiée au culte de Vénus (Aphrodite), représentée en train de rentrer dans la pièce avec un putto ailé sur l’épaule (fig. 3 et 4). Sans raison apparente, son image fut ensuite recouverte par une nouvelle composition quelconque, comportant en son centre un candélabre. La peinture originelle, d’une qualité bien supérieure, serait encore couverte sans le tremblement de terre de l’an 62 apr. J.-C. ou l’éruption de l’an 79 apr. J.-C., qui ont décollé la seconde couche de plâtre et de peinture. L’usage de cette pièce comme sacrarium est difficile à prouver ; mais, dans le cas contraire, pourquoi une pièce de petite taille, mal éclairée et profondément enfoncée dans la maison, aurait-elle été dotée d’une peinture murale cultuelle si délicate ? Le repeint peut correspondre à un changement de culte qui l’a emporté sur les considérations esthétiques. Les superstitions et l’allégeance envers un culte constituaient les fondements de l’ordre social de Pompéi, et auraient très bien pu motiver le recouvrement d’une œuvre probablement considérée comme l’une des peintures les plus admirablement réalisées de tout Pompéi. La signification cultuelle de cette peinture est également renforcée par l’absence de piquage sur sa surface, une technique pourtant largement utilisée en cas de repeint pour permettre une bonne adhérence du plâtre sur l’ancienne couche (fig. 5).
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