Fusion des univers séculier et religieux

L’hypothèse affirmant que la maison romaine a été modelée par la poursuite du luxe n’est pas uniquement réfutée par la présence de lararia, mais également par la position du chef de famille, comparable à celle d’un prêtre. Il était de son devoir d’orchestrer les observances religieuses au sein de la demeure, en grande partie concentrées autour des lararia. Caton l’Ancien raconte l’histoire d’un noble démis de sa fonction sacerdotale parce qu’il n’avait pas rempli ses obligations religieuses chez lui, un exemple de l’importance accordée à ces rituels (Bendlin 2000, p. 126). Au vu de la fusion des univers séculier et religieux au sein de la maison romaine, peut-être devrions-nous reconsidérer la définition du luxe comme étalage ostentatoire et la remplacer par la « luxuria » en tant que forme codifiée de l’expression visuelle à la base de cette fusion.

Le luxe et la richesse sont synonymes par définition, mais que signifiait réellement être riche à Pompéi ? À l’époque de la République, la fortune et les responsabilités allaient de pair. Si vous aviez de l’argent, alors on attendait de vous que vous le dépensiez pour le bien de la communauté. Une manière bien visible de procéder en ce sens consistait à améliorer l’environnement des citoyens, qu’il s’agisse de l’infrastructure ou des monuments publics : moderniser un bâtiment public, comme le théâtre de Pompéi, ou construire un nouveau bain public somptueux. Dans certains cas, les actions généreuses de cette nature étaient guidées par des intérêts personnels. Par exemple, la donation réalisée par N. Popidius Celsinus, âgé de six ans, pour la reconstruction du Temple d’Isis après le tremblement de terre en l’an 62 apr. J.-C., a poussé plusieurs auteurs à conclure que le legs avait en réalité été consenti par son père, qui n’était pas né libre et n’avait donc jamais pu accéder à des fonctions officielles. Son fils, par contre, était né libre et était donc susceptible d’être élu au conseil municipal plus tard, d’où le legs fait en son nom et non au nom de son père (Ward-Perkins et Claridge, 1977, p. 40). Des dons publics assuraient une plus grande chance d’être élu à l’ordo decurionum, le conseil puissant siégeant dans les villes. Par conséquent, la possession de richesses constituait un mélange complexe d’obligations publiques et de plaisir personnel (pour plus de détails sur ce thème, voir Pompeii AD79, 1977, p. 38).

La toute première peinture visible en rentrant dans la Casa dei Vettii témoigne de la relation très pragmatique entre la création de richesse et le luxe qui semble avoir existé dans la psyché romaine. Cette peinture représente l’image complète de Priapus avec une énorme érection.

Luxe et iconologie

Si les peintures murales étaient employées pour afficher la fortune et le statut, comme de nombreuses personnes l’ont suggéré, alors les thèmes représentés dans les peintures semblent en contradiction avec cette intention. Par exemple, il aurait été assez simple de reproduire les façades et les intérieurs des palais afin d’établir clairement le lien visuel entre le palais et la maison. Et pourtant, les preuves visuelles impressionnantes se concentrent sur des sujets religieux et mythologiques, comme la représentation de dieux, de sanctuaires, de lieux saints, de jardins paradisiaques et de paysages sacro-idylliques, des thèmes apparemment tous en désaccord, d’un point de vue conceptuel, avec la poursuite futile du luxe et le déploiement ostentatoire. Par exemple, aucune des façades architecturales très élaborées associées avec le deuxième, troisième ou quatrième style ne reproduit celles rencontrées dans les palais. Le deuxième style est entièrement dominé par la représentation de sanctuaires ou de jardins temenos, alors que les styles suivants se caractérisent par des peintures de lieux saints, de sanctuaires et de rencontres mythiques (fig. 1).

 

 

La peinture murale et la maison en tant que palais
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Villa di Poppea, Oplontis, détail montrant une des quatre portes en ivoire et en écailles de tortue, située sur des murs opposés dans l’atrium. La vignette au-dessus de cette porte représente une rue de tombeaux, indiquant donc qu’il ne s’agit pas de la représentation d’une porte de palais, mais d’une porte menant à l’Élysée.