La « villa miniature »
Afin d’appuyer sa thèse expliquant que les classes moyennes tentent d’imiter le style de vie de la classe aisée en remodelant leurs propriétés urbaines en versions « miniatures » de villas luxueuses, l’auteur attire notre attention sur un type de propriété présentée comme une « villa miniature ». En la décrivant comme un « univers de Walt Disney », il affirme clairement qu’il la perçoit comme une tentative de mauvais goût de fourrer différents éléments architecturaux associés à l’architecture de la villa hellénistique dans une seule villa (p. 156). Il développe son argument malgré l’absence de consensus sur l’évolution directe du style des villas urbaines de Pompéi ou d’autres régions de l’Italie, à partir de sources hellénistiques. Cette évolution d’un style à l’autre est néanmoins présentée comme le résultat d’imitations de piètre qualité que l’auteur associe au fossé entre les différentes classes sociales.
La prétendue « villa miniature », à laquelle le texte n’attribue aucun propriétaire en particulier (sauf dans les légendes des schémas) aurait appartenu à Octavius Quartio (l’édifice est également connu sous le nom de maison de Loreius Tiburtinus). Aucune autre source écrite ne fait référence à cette propriété, située sur la Via dell’ Abbondanza, en tant que villa « miniature ». De la page 145 à la page 156, l’auteur nous raconte qu’elle correspond à une tentative relativement médiocre d’imiter les villas luxueuses des plus riches. Une fois de plus, le « véritable bien » n’est jamais rendu visible pour éviter toute comparaison directe possible. Par contre, il nous rappelle constamment que ces demeures étaient la propriété de potentats hellénistiques (p. 145). Aux pages 194 et 195 se trouvent des plans des maisons pompéiennes, tous à l’échelle, dont le plan de L. Tiburtinus (Reg II, Insula 2.5), la maison dénommée la « villa miniature ». À côté de ce plan, se situe le plan de sol de la maison du Faune (Reg VI, Insula 12), une demeure presque aussi grande que la « villa miniature ». Toutes deux occupent une insula entière. De nombreux auteurs ont remarqué que la maison du Faune était aussi large que certains palais hellénistiques. Cet ouvrage maintient cette position lorsqu’il informe le lecteur que les dimensions monumentales de la maison du Faune pouvaient uniquement être comparées à celles des palais découverts dans les régions de Cyrénaïque et de Pella (p. 35).
Cette déclaration pose un problème puisque les deux terrains sont presque identiques dans leurs dimensions et pourtant, une propriété est décrite comme un palais et l’autre comme une « villa miniature ». Certes, une fois les jardins et les jardins à péristyle retirés des deux terrains, la maison du Faune est plus grande, mais pas de manière excessive, en particulier si l’on compare les deux constructions avec une maison aux dimensions plus standards, comme la maison des Ceii (fig. 1). Selon un calcul approximatif, les deux villas pourraient contenir plus de sept maisons aux dimensions des Ceii. On se doit de garder à l’esprit que la maison de Loreius Tiburtinus a été sélectionnée par Zanker comme un exemple typique d’une caricature de mauvais goût d’une villa, en grande partie à cause du manque d’espace. Cependant, comme mentionné précédemment, cette construction occupait un des plus grands terrains de Pompéi. Le qualificatif employé par Zanker pour remplacer le nom courant de la maison semble donc quelque peu inapproprié.
Les maisons aspirant à ressembler à des villas, comme la demeure de Loreius Tiburtinus, peuvent avoir été considérées comme des « miniatures » en comparaison aux villas royales des propriétés de campagne, mais, du point de vue des normes urbaines, la soi-disant « villa miniature » était en réalité très grande. Dans ce cas, pourquoi ne pas simplement la décrire comme une demeure urbaine avec des caractéristiques de villa ? Cependant, une telle description aurait sapé le postulat social à l’origine de la thèse du livre nécessitant un modèle inaccessible. Le thème de la miniaturisation de qualité « inférieure » est donc essentiel puisqu’il crée une séparation susceptible d’être utilisée pour désigner une différence sociale entre l’« imitation » et l’« original ».
11. Maison du Faune ; Maison de Loreius Tiburtinus (Octavius Quartio) ; Maison des Ceii.
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