Le paradeisoi (nature idéalisée) et les fontaines (thème de l’eau) sont tous deux des traits communs associés au nymphaeum et sont réinterprétés comme des caractéristiques servant à imiter les villas opulentes et leurs jardins. Les autres lectures sont contrées lorsque Paul Zanker souligne, dans la légende de sa fig. 109 (voir fig. 1 sur la page précédente), que les différents éléments manquent de liens « réalistes », comme par exemple que les illustrations de poissons apparaissent au-dessus de celles de la végétation. La question de savoir pourquoi les agencements logiques et le « réalisme » devraient être des éléments déterminants dans une « grotte » stylisée, habituellement associée aux nymphes et aux esprits de l’eau, reste éternellement en suspens. Ces paramètres deviennent néanmoins les critères définissant la pièce au final comme un « pot-pourri grotesque ».
Outre l’ironie liée à l’emploi du mot grotesque dans ce contexte, les observations de Zanker reposent en grande partie sur des preuves matérielles dans un état de délabrement avancé. Ces conditions impliqueraient à elles seules de faire preuve d’une extrême prudence dans l’étude de ces preuves, et surtout de ne pas les évaluer selon des critères modernes. Cependant, en dépit de ce fait, l’auteur tente de faire ressortir l’image d’un propriétaire rustre, intéressé uniquement par la poursuite de désirs surpassant son statut. Il traite également avec condescendance les habitants de la maison en insinuant qu’ils devaient être dotés d’une imagination débordante leur permettant d’oublier les incohérences formelles dont il nous fait prendre conscience.
En plus des problèmes évidents inhérents à ses méthodes critiques, une autre raison essentielle justifie l’absurdité de son attaque envers la sensibilité du propriétaire. Si nous entrons dans d’autres pièces de cette même maison, nous trouverons des peintures murales qui sont tout sauf grossières. Une peinture particulière est souvent mentionnée comme un exemple exceptionnel de motifs végétaux typiques du quatrième style (fig. 1). Roger Ling, dans son livre sur la peinture romaine, décrit cette œuvre comme semblable, d’un point de vue qualitatif, à la délicatesse des motifs végétaux trouvés dans l’oecus de la maison des Vettii (Ling 1991, p. 82). Pour la qualité et la sensibilité de leur réalisation, plusieurs œuvres figuratives de la maison ont été mises en évidence dans La Peinture de Pompéi – Témoignages de l’art romain dans la zone ensevelie par Vésuve en 79 ap. J.C., Éditions Hazan, 1999, p. 93-96 (illustrations 97 et 98). Elles soulignent toutes les problèmes qui surgissent lorsque l’on essaie de déterminer non seulement le caractère d’une personne, mais également ses « goûts » en se focalisant sur un nombre très limité de preuves visuelles. Un exemple flagrant est l’image discutée préalablement de Priape située à l’entrée de la maison des Vettii. L’interprétation de cette image en termes de « raison d’être » est essentielle, car une certaine lecture la présenterait comme un symbole de la poursuite hédoniste de richesse monétaire et une autre lecture pourrait lui attribuer une toute autre signification où la nature serait bien plus valorisée que la fortune.
Arts domestiques ou art dans un contexte domestique ?
« Les arts domestiques de Pompéi » correspondent à plus d’un tiers du livre. Cependant, la période de l’« art domestique » traitée ne couvre en réalité que les dix-sept dernières années de l’existence des deux villes, soit entre le tremblement de terre de l’an 62 apr. J.-C. et l’éruption dévastatrice finale de l’an 79 apr. J.-C. Puisque l’auteur ne spécifie ou ne reconnaît pas cette période par rapport à l’intention principale du chapitre, elle devient involontairement représentative de l’« art domestique » de Pompéi en général. Cette position est renforcée par le nombre très réduit de références à l’art produit directement après cette période ou, d’ailleurs, aux œuvres réalisés durant les quelques 700 années d’existence de ces deux villes, antérieures à cette époque.
1. Peinture murale représentant des motifs végétaux délicats, Maison du Centenaire.
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