Il ne s’agit visiblement pas d’une cour accessible, sauf pour les personnes autorisées à y pénétrer. Cependant, Paul Zanker choisit d’ignorer ces informations en faveur d’une référence obscure à un « tableau similaire » situé dans un palais flottant sur le Nil, propriété de Ptolémée IV (p. 143). Ce lien est pour le moins étrange et vise sans aucun doute à étayer ses propos affirmant que la tholos dans la peinture correspond à un temple « hellénistique » alors qu’en parallèle, il l’associe à la royauté et aux palais royaux, bien qu’ils soient flottants. Des temples comme ceux-ci n’étaient pas spécialement des inventions hellénistiques, mais ils remontent à la Grèce antique, et même à des origines encore plus anciennes en provenance du Proche-Orient. La tholos de Delphes en est un exemple manifeste. Ils correspondaient également à des formes architecturales fréquemment utilisées en Italie romaine, ainsi que dans ses colonies pour représenter habituellement un sanctuaire, un tombeau ou un temple.
Les conséquences d’une telle utilisation de l’image du sanctuaire dans cette peinture en particulier sont examinées en détail dans le chapitre « Le culte de la maison ». L’objectif ici est seulement de contester la tentative de Zanker visant à l’associer avec la volonté d’imiter les villas luxueuses en soulignant que la tholos n’avait aucun lien exclusif avec l’architecture de la villa ou du palais. Le propriétaire de la maison du Labyrinthe n’avait pas non plus à chercher des rapports obscurs avec les palais flottants exotiques du Nil. L’ancienne partie grecque de Pompéi comprenait une tholos construite plusieurs centaines d’années avant la maison du Labyrinthe. Les voies menant à Pompéi fournissaient également plusieurs exemples de tombeaux tholoi (fig. 1).
Tout au long de son livre, Zanker perçoit l’art « domestique » comme une preuve des aspirations sociales des habitants sans véritablement déterminer la valeur esthétique ou sémantique que lui attribuaient leurs propriétaires. La villa palatiale ou le palais royal qu’il utilise pour illustrer à la fois les aspirations sociales et le désir hédoniste proviennent uniquement de sources littéraires, alors que sa soi-disant imitation a été réalisée à travers l’art et en particulier à travers le genre d’illusions virtuelles que les peintures murales étaient capables de créer. Cette construction littéraire est citée comme étant pure, originale et inaccessible alors que les formes visuelles concrètes sont reléguées au statut d’imitation de second ordre. Son approche reflète celle d’August Mau, qui non seulement n’avait aucun scrupule à appliquer ses propres valeurs esthétiques à l’étude de la peinture murale pompéienne, mais évaluait également sa qualité en la comparant aux peintures de chevalet du XIXe siècle réalisées par des artistes comme Raphael Mengs. Il était de toute évidence en désaccord avec la conception du « progrès » en art comme un anathème qui le distingue d’autres formes d’activité humaine.
Dans des publications comme Pompeii – Public and Private Life, l’art est utilisé de façon paradoxale à la fois comme la manifestation du désir et le moyen de le satisfaire. Toutefois, aucune voix, autre que celle de l’auteur contemporain, n’est donnée à l’art. Sa thèse et sa conclusion exigent qu’il situe « l’art domestique » exclusivement dans un circuit fermé où les désirs inaccessibles sont satisfaits par l’art, celui-ci comme révélateur de luxe, le luxe comme révélateur du désir, les désirs inaccessibles étant satisfaits par l’art et ainsi de suite. Dans ce contexte, la seule valeur de l’art est celle du témoignage, qui peut être utilisé pour démontrer que le jugement esthétique du propriétaire était motivé par la cupidité. Si la simple présence de l’art, en dépit de certaines qualités spécifiques qu’il pourrait posséder, est considérée comme caractéristique du luxe, et donc de l’hédonisme, alors nul ne peut s’opposer à la théorie du livre. Cependant, les ramifications d’une telle perspective seraient extrêmement accablantes pour l’ensemble de l’histoire de l’art et la possession d’œuvres d’art. « L’art religieux » en est un exemple indiscutable. Et pourtant, une hypothèse sous-jacente présente tout au long du livre affirme que l’art, la richesse et le luxe sont synonymes et que la possession d’œuvres artistiques per se est révélatrice du désir d’obtenir un certain statut social.
1. Vestiges d’un tombeau tholos dans la Rue des Tombeaux menant à la porte d’Herculanum, Pompéi.
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