Il est généralement admis que la figure archaïque de Lespugue a également inspiré la sculpture de Picasso représentant une déesse de la fertilité tenant un vase ou une lampe qui orne désormais sa tombe dans le parc du château de Vauvenargues. Picasso a initialement créé la sculpture en 1933 en hommage à Marie-Thérèse et, en tant que synthèse de la Vénus de Lespugue et de Marie-Madeleine, ce qui implique, à juste titre, à la fois renaissance et rédemption. Aussi tortueux que puisse paraître ce parcours, il établit cependant la présence de Marie-Thérèse sur la page de titre. De plus, comme une grande partie de l'œuvre de Picasso est autobiographique, il n'est donc pas déraisonnable de supposer que la figure masculine allongée à gauche de Marie-Thérèse sous une forme archaïque est un autoportrait et que le petit personnage est le fils de Picasso et d'Olga, Paulo ; Maya, la fille qu'il a conçue avec Marie-Thérèse, n'est née qu'en 1935.

Une famille sur une plage était un thème que Picasso avait déjà évoqué et la meilleure illustration qu’il en avait faite, Famille sur une plage, 1923, représente également un homme, un enfant et une femme sur une plage (Fig. 15). Cette composition s'inscrit dans l'approche néoclassique post Naples-Pompéi de la peinture de Picasso avec ses formes sculpturales voluptueuses et sa couleur terracotta. Il a visité ces deux sites en 1917 en compagnie de Serge Diaghilev, Jean Cocteau, Léonide Massine et Igor Stravinsky. Son fils Paulo est né en 1921, ce qui suggère une fois de plus que cette scène familiale a un contexte autobiographique. La figure masculine allongée, distinctement raide, apparaît figée de manière ambiguë entre le sommeil et la mort, ce qui est suggéré de manière évocatrice par la façon dont sa main couvre ses organes génitaux. Picasso prenait normalement beaucoup de plaisir à exagérer cette partie de l'anatomie masculine ; dont la perte signifiait pour lui la mort. Ceci est abondamment représenté dans ses peintures post-impuissance réalisées au cours des dernières années de sa vie. Le petit garçon touche tendrement le visage de son père, pour le réveiller ou le ranimer, et ainsi met en évidence la tristesse du père ou peut-être même sa disparition. Lorsqu'il rencontra Marie-Thérèse Walter, âgée de 17 ans, au début de janvier 1927, son mariage avec Olga avait implosé et bien qu'il ne soit pas officiellement séparé, il signala son mécontentement dans des peintures telles que Famille sur une plage. Cette dernière n'a jamais été exposée ou photographiée de son vivant, ce qui suggère qu'elle avait une signification très personnelle pour lui. À bien des égards, son atmosphère sombre et étrange évoque le moment où les familles pompéiennes ont tenté de se réconforter et de se protéger du cataclysme imminent causé par l'éruption volcanique du Vésuve en 79 après JC (Fig.16).

 

Fig.15 Picasso. Famille sur une plage, peinture, 1923

Fig.16 Famille submergée par les cendres volcaniques chaudes, après l'éruption Pompéi 79 A.D.