Des scènes sans acteurs?
Les peintures murales envisagées comme des représentations de scènes sans acteurs sont généralement associées au deuxième style dit « architectural ». La majorité de ces œuvres ne contient pas de références figuratives, une minorité de ces peintures est constituée de personnages non identifiables, de statues ou de masques. Dans son essai de 1936 Scaenography, A.G.M. Little a décrit ces productions comme « […] une vingtaine de décors de théâtre tout au plus […] », dont la majorité « […] appartient au genre tragique […] », qu’il définit comme « […] un propylaeum de type palatial (susceptible d’être interprété comme un élément architectural spécifique à un palais, à un sanctuaire ou à une place publique) donnant sur une cour à péristyle.* Dans le type I, la cour à péristyle est fermée par des portes ; dans le type II, une tholos est aperçue à travers l’ouverture centrale, et dans le type III, l’extrémité opposée de la cour déserte est visible pour l’observateur (Little, 1936, p. 411) (figs.1-3). Avant d’examiner cette hypothèse plus en profondeur, nous devons tout d’abord faire toute la lumière sur cette référence au propylaeum (propylée) dont la définition habituelle est une porte cérémoniale ou un portique menant à un temple ou à un sanctuaire. Little en ajoutant les mots "palatial" et "palace" a sans doute voulu essayé de rendre cette structure conforme au prérequis de Vitruvius qui veut que les décors du théâtre tragique dépeignent l'architecture royale.
Lorsque les illustrations des trois types de décors tragiques réalisées par Little sont comparées avec les peintures murales originales, d’autres anomalies plutôt intéressantes commencent à faire leur apparition. Par exemple, l’auteur clame que les décors tragiques reflètent « […] sans aucun doute des peintures réalistes de scaenae frontes […] » (Little, 1936, p. 411). Toutefois, à l’exception d’une œuvre, toutes les peintures murales citées comportent une seule et unique porte ou entrée centrale, contrairement aux trois entrées normalement associées à un « scaenae frontes » (mot qui, selon lui, désigne le mur situé à l’arrière de la scène). Little a reconnu la faille dans son raisonnement et a tenté de la combler en affirmant que les petites dimensions de la pièce ou la présence de véritables portes rendaient inutile la représentation de plus d’une porte spécifique au décor théâtral. Sa tentative de masquer le défaut fondamental de sa logique ne convainc personne et rend son utilisation des termes « scaenae frontes bien définis » quelque peu problématique, plus précisément parce qu’il caractérise le premier type de décor tragique comme une cour à péristyle « fermée par des portes » et non pas par une porte unique (Little, 1934, p. 411).
Type I : les portes closes
Malgré l’anomalie de la porte unique, A.G.M Little utilise cet élément pour soutenir sa classification dans le« type I » des peintures murales aux décors tragiques, retrouvées dans la Villa Item et Villa P. Fannius Synistor. La porte close se pose clairement en tant que motif caractéristique de ces peintures pompéiennes. Toutefois, pour que cette porte soit représentative d’un décor tragique, elle doit être associée à la façade d’un palais royal. Bien que la porte se situe dans un environnement architectural richement orné, l’imagerie symbolique environnante liée aux dieux et aux ancêtres, suggère que ces portes ne sont pas destinées à être ouvertes, ou ne peuvent être franchies que par quelques rares élus. En résumé, ces structures ne se référent pas aux portes des décors de théâtre, librement empruntées par les acteurs lors des représentations. Leur valeur symbolique réside dans leur configuration de portes closes. Pour de plus amples informations sur le motif de la porte close, voir le chapitre intitulé False-Doors.
|